[L’Entretien des Muses] Plein feu sur le clavecin avec son jeune serviteur Loris Barrucand !

Cette semaine, notre muse est un jeune homme très sympathique. « Ami fidèle » d’Harmonia sacra, il participe au rayonnement de notre festival depuis plusieurs années déjà ! À ce titre, Je suis allé à sa rencontre pour vous révéler les qualités musicales mais aussi humaines de ce talentueux claveciniste.

 

Cher Loris, on vous retrouve à trois reprises dans la programmation du festival 2018 : comme musicien avec le gambiste Robin Pharo pour le concert « Trésors de la viole française* », puis sous la direction de Yannick Lemaire dans le « Jephté* » de Carissimi et enfin comme pédagogue dans l’atelier « À la découverte du clavecin » (À l’école du baroque). Si jeune et déjà tellement sollicité…

 

Il est vrai que trois contributions au sein d’une même édition, c’est une opportunité assez rare ! Cela fait maintenant quelques années que Yannick Lemaire m’accorde sa confiance pour divers projets (concerts, ateliers pédagogiques, Opérabus…) et je l’en remercie chaleureusement !

 

* Trésor de la ville française, le samedi 19 mai 18h30, église de Maing

* Jephté de Carissimi, le dimanche 27 mai 16h30, église St Géry de Valenciennes

 

 

Mais dans ces 2 concerts, le rôle du claveciniste est-il le même ? Je n’ose vous demander votre préférence…

 

Vous savez, entre Jephté et le programme concocté par Robin Pharo, le rôle du clavecin n’est en réalité pas si différent. Dans les deux cas, le clavecin fait partie de la basse continue, un ensemble d’instruments qui jouent la basse et qui « réalisent » l’harmonie. Concrètement, la main gauche du claveciniste joue la partie indiquée sur la partition alors que la main droite improvise assez librement à l’aide d’une « grille » notée en chiffres.

 

Dans les pièces de viole, le rôle de la basse continue est de créer le cocon sonore le plus moelleux possible afin d’offrir confort et liberté à la viole soliste. Dans les pièces vocales comme Jephté, le clavecin a le double rôle de moteur rythmique et de soutien harmonique. L’idée ici est d’aider les chanteurs à rendre claire et intelligible chaque articulation du texte.

 

 

Faites-vous partie d’un ensemble régulier ou bien êtes-vous plutôt un musicien qui cultive son indépendance ?

 

Pratiquer la musique ancienne, c’est être un nomade de profession ! En effet, comme il n’existe pas de poste de titulaire dans les ensembles de musique ancienne, le claveciniste reste indépendant toute sa carrière. Contrairement à ce que vous pourriez croire, cette liberté est précieuse car elle nous permet de travailler avec un grand nombre de musiciens et de participer à des projets très variés.

 

Pour ma part, je travaille régulièrement comme claveciniste et chef de chant au sein d’ensembles à grand effectif comme Les Talens Lyriques, Les Cris de Paris, La Tempête et Correspondances. Par ailleurs, j’ai constitué avec des amis et collègues un ensemble vocal, l’Ensemble Cosmos, et un ensemble instrumental détonnant, l’Ensemble Sarbacanes. Et comment ne pas évoquer mon acolyte depuis tant d’années, le claveciniste Clément Geoffroy, avec qui un nouveau projet à deux clavecins va bientôt voir le jour.

 

 

Et bien justement, quelles sont vos préférences en matière de clavecins ? Y a-t-il un « instrument » pour lequel vous gardez un souvenir particulier ...

 

Oh oui, je garde un souvenir très ému de la première fois que j’ai entendu le clavecin de Philippe Humeau qu’on surnomme affectueusement « le petit séquoia ». Il s’agit d’un tout petit clavecin italien aux sonorités claires et rondes et dont le timbre si particulier permet de le discerner nettement même au fond de l’orchestre ! J’ai récemment fait l’acquisition d’un clavecin français de Titus Crijnen. Un coup de cœur… dont je peux profiter tous les jours au saut du lit !!!

 

 

Le festival « Embar(o)quement immédiat », ce n’est pas qu’une classique série de concerts, c’est aussi « la musique offerte au jeune public ». Ainsi du 16 au 20 avril 2018, vous proposerez vingt séances de « découverte du clavecin » dans les établissements scolaires de Valenciennes Métropole ! Vous les gâtez… Quelles intentions pédagogiques vous motivent dans cette généreuse aventure?

 

Partager le goût de la musique en dehors des salles de concert est un des premiers devoirs que je me suis fixé ! Il faut tout d’abord montrer aux enfants qu’être musicien, c’est avoir un métier comme un autre bien qu’il ne ressemble à aucun autre ! Par ailleurs, on essaie avec ces ateliers de piquer leur curiosité en les confrontant à un style musical qui leur est bien souvent inconnu. Le fait que le clavecin soit étroitement associé à l’histoire des XVIIème et XVIIIème est un avantage car il permet de s’ancrer dans une époque très suggestive, celle de Louis XIV, de Versailles, de la peinture, de la danse… Autant que possible, j’en profite pour déboulonner quelques clichés sur cette époque ! Ainsi, ces ateliers sont autant une introduction au clavecin qu’un premier coup d’œil historique sur l’Ancien Régime. Et c’est toujours un succès si on en juge par la justesse des remarques des petits valenciennois !

 

 

Vous qui connaissez Yannick Lemaire et le festival depuis quelques années déjà, qu’est-ce qui vous incite à y revenir ?

 

Tous ceux qui sont passés par « Embar(o)quement immédiat » vous le diront : grâce à la bienveillance de Yannick et à l’énergie incroyable des bénévoles du festival, il y a ici une atmosphère enthousiasmante qui vous donne envie d’y retourner encore et encore !

 

Aucun doute, cette année encore de nombreux enfants seront touchés par « la Fée Musique » ! Ils le devront en grande partie à son fidèle et enthousiaste assistant ! Les plus grands ne seront pas en reste : notre ami Loris fera sonner son clavecin par deux fois en mai dans les églises du valenciennois pour le plus grand bonheur de ses compagnons musiciens et du public !

 

Propos recueillis par Michel Fielbal

Loris Barrucand