[L’Entretien des Muses] s’offre un moment de douce magie avec « La Rêveuse » !

Des marionnettes à tige, un théâtre d’objets, un chariot-castelet magique, des gaines, une viole de gambe, un luth et une guitare… mais que nous concocte l’ensemble « La Rêveuse » avec cet alléchant « bric à brac » pour son spectacle en famille le mardi 22 mai 19h à l’Espace Athéna de Saint-Saulve !!!? Je suis allé pour vous à la « brocante » des infos auprès de la violiste-conteuse Florence Bolton ! Rassurez-vous, je n’ai pas été transformé en cornet à bouquin ou autre saqueboute baroque à l’issue de l’entretien !!!

 

 

Vous allez donc proposer un spectacle musical « Jack et le haricot magique » à l’Espace Athéna de Saint-Saulve ! Ce n’est donc pas un concert dont il sera question…

 

En effet, c’est un spectacle qui mélange musique et marionnettes, autour du conte anglais Jack et le haricot magique. L’idée de ce spectacle était de faire découvrir aux enfants la musique et les instruments anciens, par le biais d’une histoire…

 

 

Lors du festival 2017, vous aviez déjà proposé un très beau et très original programme autour des « Caractères » de La Bruyère avec le récitant Benjamin Lazar ! Un des moments les plus poétiques du festival à mon souvenir ! Vous faites-vous les spécialistes de projets mêlant diverses pratiques artistiques ?

 

Nous vivons une époque dans laquelle tout est très cloisonné. En faisant des projets qui croisent plusieurs disciplines, on a aussi une chance de croiser les publics. C’est essentiel ! Dans le cas des projets avec Benjamin Lazar, nous croisons public de théâtre et public de musique, ce qui permet au public de théâtre de découvrir la musique baroque et au public de concert de découvrir un texte magnifique, permettant de mieux appréhender une époque. Nous mélangeons aussi souvent musique et peinture dans nos projets. Un art permet en général d’en comprendre un autre. Mais nous faisons aussi parallèlement beaucoup de concerts de forme « classique ».

 

 

« Spectacle en famille » donc cette année : le rapport avec un jeune public change-t-il votre approche de la musique ? Et d’ailleurs, les enfants offrent-ils un écho favorable à ces sons si éloignés de leur écoute habituelle ?

 

Jouer devant des enfants est un excellent test : si la musique ne leur parle pas, ils n’écoutent pas. On n’a donc pas le droit à l’erreur !Nous avons choisi de jouer de la musique à danser populaire, qui est très rythmique. Les enfants réagissent tout de suite en tapant dans leurs mains et généralement viennent nous dire à la fin que la musique est « trop bien ! ». J’ai l’impression qu’ils prennent cette musique comme elle est, avec simplicité, sans se dire que c’est de la musique ancienne. Comme quoi, cette musique nous parle encore, malgré les siècles !

 

 

Mais parlez-nous un peu plus précisément de la musique que nous allons entendre … et quel sera son rapport au conte, simple accompagnement musical ?

 

Nous avions envie de jouer des pièces extraites d’un recueil de pièces à danser, The English Dancing Master, de John Playford, compilé en 1651. Du coup, il fallait trouver une histoire anglaise qui s’accorde avec ! La musique et le conte partagent une même histoire, celle de l’oralité.

En effet, il existe de nombreuses variantes de Jack, du fait que cette histoire a été colportée et transmise de bouche à oreille pendant des siècles. Les airs à danser de notre recueil ont eu la même histoire : transmis oralement de génération en génération, ils ont été collectés dans les campagnes anglaises au 17ème siècle, par l’éditeur londonien John Playford, comme l’ont fait Charles Perrault ou les frères Grimm. D’ailleurs The English dancing master propose souvent plusieurs variantes d’un même air, comme pour les contes. The English Dancing Master a connu de nombreuses rééditions, dès sa parution, preuve de son succès.

 

 

« La Rêveuse », une pièce de viole du compositeur Marin Marais, je crois… Qu’est-ce qui a motivé votre choix  lors de la création de votre ensemble ?

 

Le titre de cette très belle pièce de Marais nous a tout de suite parlé ! Peut-être parce qu’elle nous rappelle qu’il ne faut pas occulter cette part de rêve qui nous porte et nous fait avancer dans la vie ? Nous venons d’ailleurs d’enregistrer la pièce en question dans un disque consacré à Marin Marais, après l’avoir jouée des années en concert.

 

 

D’ailleurs les compositeurs français de l’époque ont fréquemment « titré » leurs pièces de façon très poétique ! Pouvez-vous éclairer notre lanterne sur cette énigmatique pratique musicale de l’époque ?

       

On les nomme en effet des « pièces de caractère » ; l’univers musical en France au début du 18ème siècle est très imagé et fuit l’abstraction. Ces pièces de caractère, que l’on trouve aussi par exemple chez François Couperin, Marin Marais, et d’autres compositeurs de cette époque, évoquent des Caractères au sens où La Bruyère l’entendait, mais elles peuvent aussi croquer sur le vif en quelques traits de vraies personnes, ou de petites scènes de genre observées au quotidien, des paysages…

       

Cette pratique musicale va de pair avec l’évolution de la peinture au 18ème siècle, qui délaisse les grands genres « louisquatorziens » de la peinture d’histoire pour s’intéresser au « petit genre », qui représente non plus des symboles ou des allégories, mais le quotidien. C’est une grande révolution esthétique, qui va de pair avec les changements sociaux. On fait enfin de la peinture ou de la musique qui peuvent toucher en théorie tout le monde et non plus quelques happy few.

 

 

Je sais que vous avez fait une tournée avec l’Opéra Bus d’Harmonia sacra ! Un bel outil ... une belle aventure … ?

 

Oh oui !!! Nous avons eu la chance de travailler déjà en 2016 avec l’Opéra Bus au festival de Lanvellec qui l’a loué à Harmonia sacra pour fêter les 30 ans du festival. Nous l’avons tellement aimé que nous le louons cette année pour faire une tournée de 4 semaines en région Centre avec La Rêveuse, en milieu rural. L’Opéra Bus permet justement d’aller à la rencontre d’autres publics, de ceux qui ne vont pas au concert ou au musée.

Encore bravo à Yannick, à David le régisseur et à toute l’équipe, cet Opéra Bus, c’est un objet culturel des plus innovants  de ces dernières années !

 

 

Et MERCI à La Rêveuse de faire vivre de si belle manière cet Opéra Bus, petit bijou d’ Harmonia sacra dont de nombreux bénévoles qui ont travaillé sans relâche à sa création peuvent être fiers ! Nous lui souhaitons bonne route et bon accueil en région Centre, qu’il « colporte » avec La Rêveuse « cette part de rêve qui nous fait avancer dans la vie » ! Quel autre plus programme !

Jack et le haricot magique - La Rêveuse